La mouche du coach

ON S’AGACE… J’ai horreur du mot « gratitude »

« Partout, j’entends des gens dire qu’ils ont beaucoup de gratitude. Mais ce n’est pas un attribut dont on peut se vanter ! Moi, je dis juste merci. »… Vivianne VERRY pousse un coup gueule à propos de ce terme qu’elle estime souvent impropre et trop galvaudé.

« L’autre jour, avec un groupe de supervision, on a parlé de certains mots qui résonnent en nous comme quelque chose de familier, et de l’importance de nommer nos émotions. Nommer les émotions, c’est en effet contacter une part de ce qu’on va pouvoir montrer à l’autre.

Une émergence de la relation

Quand on analyse la relation, on travaille aussi sur la capacité d’un praticien à aller visiter la position de l’autre, à faire des aller-retours entre la sienne et celle de son client/patient. C’est ainsi qu’il récupère des informations. Et ces informations sont au service l’accompagnement, de la qualité de la relation.

La gratitude émerge dans cet aller-retour, à travers ce qu’il a donné à l’autre et ce que, l’ayant donné, il a reçu lui-même. C’est un sentiment sur ce qu’on lui a donné, qu’il renvoie à l’autre. En tant que praticien(ne), on n’A pas de gratitude. C’est l’autre qui nous la donne : on la ressent en recevant de lui. Il nous fait “refléter” de la gratitude. C’est parce qu’on se glisse dans la position de l’autre et/ou à partir de ce qu’il m’a donné qu’on éprouve de la gratitude.

L’expression d’une richesse

Elle vient en réaction à ce qui existe dans la relation, à ce qui m’y est donné. Si je m’enrichis de la relation, c’est que j’aurai visité ce que l’autre aura bien voulu que je visite de son territoire. Je deviens alors une version augmentée, meilleure, du coach/consultant/thérapeute que je suis, parce que je suis enrichi(e) de lui. Parce que je lui ai laissé de la place dans la relation et parce qu’il m’a ouvert son espace, j’en ressors plus riche.

En conséquence, je ne peux pas dire que J’AI de la gratitude. Ce ressenti n’existe pas sans stimulus : il est provoqué par un déclencheur. Ma gratitude est motivée par cette autorisation que la personne me donne. C’est aussi se mettre en vulnérabilité, que de me permettre de poser mon regard sur elle. Au départ, je n’ai donc pas de gratitude : ma gratitude est conditionnée au bon vouloir de mon client/patient. À la place qu’il me fait, et que je lui fais en moi en retour. C’est une sensation d’accueil reconnue comme telle et magnifiée, déployée comme une chance, un privilège que l’autre m’accorde.  

Un bonus inattendu

Cela me semble un point essentiel de notre éthique. En termes de respect, de protection du client/patient. Soigner la relation, c’est aussi justement soigner cette éthique avec laquelle je vais sur le terrain que l’autre m’accorde. Dans cet espace, je n’attends rien, et la gratitude arrive en supplément – comme un putain de bonus. »

Par Vivianne VERRY, formatrice et superviseur.

 

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